Drumont devient une figure politique à Alger
" Mercredi 6 Avril - 9h19' soir.
Le port pendant le séjour de Drumont à Alger"
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Pendant un apaisement de la situation en février - par suite des mesures pénales contre les nommés “voyous” - Max Régis se rendit à Paris où il rencontra le “pape de l’antisémitisme”, Edouard Drumont. Ce dernier, envisageant lui-même une carrière politique, encouragé par ses succès éditoriaux, fut rapidement convaincu par Régis de se présenter aux élections législatives algérienne du mois de mai. Max Régis, trop jeune encore, se fit promettre la place au conseil de Drumont, dès qu’il aurait atteint l’âge légal ; une promesse qui ne sera jamais tenue.
L’arrivée d’Edouard Drumont à Alger, marqua l’apogée du mouvement antijuif algérien. Les événements décrits ci-dessus avaient fait prospérer l’antisémitisme - encore renforcé par des problèmes économiques du pays - surtout parmi les ouvriers et des couches défavorisées de la population. Ces dernières furent par conséquence les plus nombreux à accueillir leur espoir politique, Edouard Drumont, qui débarqua au port d’Alger le 21 avril 1898.
Le 8 mai 1898, Drumont remportait les élections, auxquelles il s’était présenté en tant que “candidat antijuif”, avec cinq fois plus de voix que ses concurrents. Il fondait à la chambre une “groupe parlementaire antisémite” prévoyant pas seulement l'abolition du décret Crémieux, mais également l’expulsion des Juifs de toute la sphère publique, des écoles et des universités, ainsi que le retrait de la naturalisation de tous les citoyens qu'ils jugeaient indésirables.
L’une des raisons pour ce succès énorme fut aussi l’abstention importante de l’électorat juif, faute d’une décente alternative aux candidats de la liste “drumontiste”, comme Henri Tubiana, commerçant algérien, le décrivait dans une lettre au Président de l’Alliance, datant du 20 mai 1898 :
“Je leur avais signalé, le danger de produire une candidature exotique pour combattre Drumont, l’esprit obtus de ces Messieurs ne pourrait être éclairé par la logique des choses, ils se sont heurtés à des manifestations symboliques que leurs agissements n’a fait qu’exalter. Drumont représentant une idée, un symbole. [...] “
Lettre du 20.05.1898 d'Henry Tubiana à l'Alliance, récapitulant les éléctions
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Pourtant, seulement quelques temps après les élections, il s’avéra que Drumont n’était pas capable de représenter des idées politiques au conseil municipal. En dehors d’une propagation populiste de la haine, il manquait d'un véritable programme politique. Mauvais orateur et méprisant envers les règles du conseil municipal, il ne pouvait ni ne voulait apporter de profonds changements. Aux prochaines élections algériennes de 1901, Drumont n'était pas réélu.